Les nouvelles obligations relatives à l’achat responsable :
La transition écologique et les dérèglements climatiques sont au cœur des préoccupations gouvernementales, territoriales et individuelles. Conscient du poids de la commande publique, qui en 2023 représente 8.8% du PIB pour un volume financier total de 248 milliards d’euros, le législateur s’appuie à nouveau sur ce levier pour introduire de nouvelles obligations contraignant les acheteurs publics.
Etat des lieux des grandes mesures et de leurs impacts pour les entreprises dans leur réponse aux marchés publics.
1. PNAD (Plan National pour des Achats Durables)
Présentation
Publié avec un peu de retard en raison du COVID et très attendu par les acheteurs publics, le PNAD, porté par le Ministère de la transition écologique pour la période 2022-2025, fixe de nouveaux objectifs très ambitieux aux acheteurs publics :
RSE, 100% de leurs futurs achats devront comporter une considération environnementale, 30% devront comporter une considération sociale. L’ensemble à horizon … 2025 !
Dès lors, la majorité des politiques achats responsables ou des SPASER adoptés par les acheteurs publics surfent sur ces objectifs, qui sont intégrés tels quels dans leurs stratégies d’achat et a fortiori, dans leur programmation achats.
Ce que ça change pour les entreprises :
Les marchés publics à venir comporteront des considérations environnementales crescendo afin d’approcher cet objectif à l’échéance fixée. Cela pourra être intégré soit en critère à part, ou en sous-critère de notation des offres techniques, soit en condition d’exécution (un article dans le CCTP qui impose une obligation d’exécuter une prestation spécifique au développement durable, en complément des prestations objet du marché), soit en combinant les deux.
Le marché public peut aussi prévoir dans ses spécifications et exigences techniques une considération environnementale (par exemple des matières bio ou des matériaux bas carbone) ou tout simplement, déterminer son objet comme étant lui-même environnemental (par exemple : l’acquisition de panneaux photovoltaïques).
2. Loi AGEC
Présentation
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi AGEC, vise à renforcer la prise en compte de l’économie circulaire dans la commande publique.
À ce titre, les biens acquis par l’État, les collectivités territoriales et leurs groupements devront comprendre une proportion, allant de 20% à 100% du volume de commande, de biens issus du réemploi, de la réutilisation, du reconditionnement ou intégrant des matières recyclées.
Parmi les familles de produits concernés, on trouve : le mobilier de bureau, le matériel informatique, la reprographie et les fournitures de bureau, les papiers et imprimés, etc.
Les acheteurs publics ont rapidement exprimé leur inquiétude face à de tels niveaux d’exigence, considérant que cela mettrait en difficulté les filières, et donc les entreprises susceptibles de répondre à leurs marchés publics et par conséquent, susceptibles de prendre aussi en compte cette contrainte supplémentaire à celles déjà imposées par le code de la commande publique en termes de développement durable.
La loi AGEC de 2020 prévoyait également qu’un bilan devait être produit pour faire état de la mise en application de ces consignes. Constatant la réelle difficulté des acheteurs publics et des filières à y répondre, le législateur a entrepris de revisiter la loi AGEC : la V2 a donc été promulguée par décret n°2024-134 du 21 février 2024.
Ce que ça change pour les entreprises
Les acheteurs publics ont l’obligation de prévoir un pourcentage correspondant à un part de produits issus de l’économie circulaire (recyclage, revalorisation, réemploi). Ce pourcentage est fixé par la loi AGEC, et peut aller de 20% à 70% selon les types de produits : par exemple, l’objectif est de 40% pour l’achat de papier incorporant des matières recyclées d’ici 2030.
Cette spécification technique représente pour l’entreprise une condition de conformité de son offre. Cependant, conscient de la difficulté que cela représente pour les filières, l’acheteur public s’assurera en sourcing de leur capacité à répondre au marché dans ces conditions.
3. Loi Climat et Résilience
Présentation
Publiée le 24 août 2024, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (dite loi « Climat et résilience ») vise à développer la prise en compte du développement durable lors de la passation et l’exécution des contrats de la commande publique.
Outre le renforcement en termes de politiques achats responsables, la loi Climat et Résilience rappelle que le développement durable dans la commande publique repose sur trois dimensions : économique, sociale et environnementale. Dans ce cadre, elle impose à l’acheteur de déterminer des considérations environnementales dans les conditions d’exécution et les spécifications techniques d’ici 2026. La prise en compte de l’environnement est également renforcée au titre des critères d’attribution.
Pour la clause sociale, les obligations sont les mêmes, à la seule différence qu’elles ne s’imposent qu’aux procédures formalisées. Enfin, une nouvelle interdiction facultative de soumissionner est introduite : celle de disposer d’un plan de vigilance, qui lui, s’impose aux entreprises de plus de 5 000 salariés en France (et 10 000 à l’international) au titre de l’article L.225-102-4 du code du commerce.
Ce que ça change pour les entreprises
L’acheteur public visera ainsi à introduire davantage de conditions d’exécution, de critères de sélection des offres et/ ou de spécificités techniques dans ses marchés publics. Le tout, bien sûr, après s’être assuré auprès du secteur de sa capacité à répondre à ces exigences. Le code de la commande publique, enrichi de la jurisprudence en la matière, impose des limites à l’exercice dans le sens où les considérations environnementales et sociales ne peuvent être introduites qu’à partir du moment où elles sont liées à l’objet du marché.
En ce qui concerne l’objectif économique, c’est une bonne nouvelle pour les entreprises. Cela signifie que l’acheteur public introduira encore davantage de conditions d’exécution qui permettront de développer l’accès à la commande publique à tout type d’entreprise, quelle que soit sa taille, son chiffre d’affaires, sa date de création, etc.
4. La loi Industrie Verte
Présentation
La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a pour objectif d’accélérer la réindustrialisation du pays mais aussi de faire de la France le leader de l’industrie verte en Europe.
Trois axes déterminent les actions en conséquence, dont un relatif à la commande publique. « Verdir la commande publique » décline ainsi dans les articles 25 à 30 de la loi, les obligations pour les acheteurs publics relatives aux considérations environnementales à introduire dans les marchés publics, qu’elles concernent la candidature ou l’offre du soumissionnaire. Ainsi ? la candidature peut exiger la production d’un BEGES (Bilan des émissions de gaz à effet de serre) et introduire des critères environnementaux pour les produits-clés de la décarbonation.
Ce que ça change pour les entreprises
A l’instar des contraintes qui pèsent sur l’acheteur public au titre des lois et plans d’actions présentés ici, les entreprises trouveront davantage de contraintes environnementales, liées à l’exécution du marché et/ou à la présentation de leur candidature, dans les futurs achats des agents publics.
Le sourcing est un élément déterminant pour un acheteur public, qui lui permet de déterminer s’il peut introduire ces considérations de développement durable sans pour autant qu’elles représentent une difficulté d’ordre budgétaire, technique et opérationnel autant pour lui que pour les opérateurs économiques susceptibles de répondre à son besoin. Répondez-y sans hésiter !
Il vous permettra aussi d’expliquer ce qui fait votre différence, d’être informé de la publication du marché et d’assurer votre veille sur la programmation achats d’une personne publique.